vendredi 5 juin 2015

Fraude scientifique et publication ouverte #openaccess

[caption id="attachment_2753" align="aligncenter" width="149"]cliquez sur l'image cliquez sur l'image[/caption]

Hier est paru un très bon article dans Le Temps, par Olivier Dessibourg (parenthèse : si Le Monde peut fournir tant d'articles au Temps, peut-être peuvent-ils leur emprunter à l'occasion leur excellente rubrique scientifique ? [mise à jour, voir ci-dessous]) :

Comment inventer des résultats scientifiques et en faire parler les médias

L'article rapporte en faisant un parallèle intéressant deux scandales récents qui secouent le milieu scientifique : le sociologue Michael Lacour a inventé les données ayant servi à publier une étude très visible et influente sur la façon dont on peut influencer le degré d'homophobie des gens (voir suite du dossier ici). Et le journaliste John Bohannon a effectué une étude bidon ayant pour objectif d'obtenir un résultat aléatoire lié au chocolat, l'a publié dans un journal poubelle, et a obtenu une large couverture journalistique de son pseudo-résultat.

J'ai eu un échange sur Twitter avec Olivier, parce que je ne suis pas d'accord avec la section suivant de l'article :
Ensuite parce qu’une vague déferle sur le monde de la publication, celle de l’open access: avant, c’est le lecteur d’une revue comme Science qui devait payer très cher pour y avoir accès, les savants y publiant gratuitement. Avec l’open access, c’est l’inverse: le chercheur paie pour publier, et la lecture est libre. Ce système a ses avantages (rendre la science accessible) et ses inconvénients: les revues open access de seconde zone acceptent parfois très peu scrupuleusement des études (donc avec un peer review léger, voire inexistant), contre paiement, pour générer du profit. C’est dans cette brèche que s’est infiltré John Bohannon – et il n’est de loin pas le seul.

Je trouve le mélange open access - pseudo-science erroné et détrimental.

Les journaux poubelle et la possibilité de publier des résultats faux, il y a toujours eu. Elsevier, le géant "respectable" de l'édition traditionnelle a fait des faux journaux au service de l'industrie pharma, et a encore un journal Homeopathy, dont on se demande ce qu'il peut publier de légitime.

Par ailleurs, les journaux Open access normaux ont les mêmes standards de publication que les bons journaux traditionnels, mais l'information scientifique est disponible librement et gratuitement pour tous, et est réutilisable.

J'allais écrire une réponse longue, mais je me rends compte que j'ai déjà tout dit dans un billet précédent : L'open access ne nuit pas à la qualité scientifique. Dont acte.

Je vais quand même rajouter qu'il me semble que les journalistes scientifiques devraient être le fer de lance du combat pour l'open access, puisque leur mission est d'accéder à la science et de la rendre accessible. Alors c'est très dommage de colporter une image erronée et très négative de ce mouvement.

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Mise-à-jour par rapport à la remarque entre parenthèses ci-dessus. Olivier me tweete :

 

6 commentaires:

  1. Quel est le vrai problème ?

    La fraude scientifique ? Les journaux (scientifiques) poubelles ? Ou l'hypermédiatisation des discours obscurantistes et des charlataneries.

    Il n'est pas anodin que le premier cas de fraude mentionné ait été publié dans la prestigieuse Science. Ce n'est certes qu'une anecdote. Quant à l'obscurantisme et à la charlatanerie, ils n'ont pas besoin de publications scientifiques, traditionnelles ou open source pour prospérer.

    La réponse est dans l'éducation à la rationalité, la vulgarisation de la vraie science, la déconstruction des mythes... et la déontologie scientifique et journalistique.

    Des cas de fraude scientifiques ? Combien de cas d'études scientifiquement acceptables ayant fait l'objet d'une surmédiatisation frauduleuse ?

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  2. D'accord avec tout ce que tu dis sur l'accès libre. Sur les médias crédules face à l'étude du chocolat toutefois, nuance: Bohannon dit que 12 médias ont repris sa "nouvelle", dont 2 éditions du Huffington Post, ce qui est 12 de trop certes, mais peu par rapport au grand nombre qui ont reçu son communiqué. Aucun grand média ni média de science ne figure dans sa liste. J'y vois un argument de plus pour eduquer les lecteurs à être plus sélectifs dans leurs choix de sources d'infos...

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  3. Merci pour ton commentaire. Tout-à-fait d'accord, la communication sur le hoax a répété souvent qu'il a réussi à tromper les médias, mais il en a trompé très peu.

    En fait, le nom de Bohannon est en passe de devenir un drapeau rouge de pseudo-investigation pour moi. Après le scoop "certains mauvais journaux scientifiques acceptent de mauvais articles" il a le scoop "certains médias de mauvaise qualité répètent les nouvelles sensationalistes sans les vérifier".

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  4. […] Hier est paru un très bon article dans Le Temps, par Olivier Dessibourg (parenthèse : si Le Monde peut fournir tant d’articles au Temps, peut-être peuvent-ils leur emprunter à l’occasion leur excellente rubrique scientifique ?  […]

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  5. Même sans fraude, c'est facile de publier quasiment n'importe quoi aujourd'hui. L'arbitrage ne filtre pas autant qu'il le devrait. Sans compter que sans parler de fraude, beaucoup de chercheurs cherchent des résultats spectaculaire là où n'a rien.

    http://voir.ca/yvan-dutil/2015/05/27/quand-la-science-nourrit-la-pseudoscience/

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